Arrivée

Débarquement des chasseurs de primes les plus paumés de la Galaxie dans un des seuls endroits un peu clean et select de ce misérable grain de poussière qu'était Tatooine.

Une poussière elle-même épaisse, suffocante, chaude et usée, limite de la saleté fossilisée à la surface d'un caillou lunaire, mais que Jol'ju aimait comme la fine pellicule grise qui recouvre les vieux jouets d'enfance oubliés dans un coin du grenier.

Peut-être était-ce pour ça que, malgré sa géographie associale, Tatooine attirait comme un aimant tous ceux qui en partaient brasser un peu d'Histoire.

Arrivés à la cantina, ils se fondirent dans la masse bourdonnante des clients et commandèrent autant de brandy corellien qu'il fallut pour obtenir ce qu'ils cherchaient: c'est-à-dire un petit flyer indiquant l'endroit où aurait lieu le concert de Zamu (dont le vrai nom n'était bien entendu pas évoqué ouvertement).

Coup de bol, trois ou quatre autres groupes se partageaient les lieux, un grand amphithéâtre naturel en plein désert.

"Voyons voir... fit Jol'ju. Si je me rappelle bien, les Giddy Rock sont connus pour toujours porter un masque, si bien que seul leur manager connaît leur vrai visage. (il but son brandy d'un trait) Je pense qu'on peut raisonnablement emprunter leur matériel et se faire passer pour eux afin d'approcher notre prime avant le concert. Après, on l'embarque et on se barre. Pas mal, comme plan, hein? Eh, Patron, six barons, et, et des pailles!"

Ah, ils étaient beaux, les chasseurs de primes, une fois "mis en condition" par la gnôle!
Mais il en fallait plus pour les abattre, et pas moins pour leur donner le courage de faire ce qu'ils allaient faire.
Titubant, Jol'ju sortit se soulager à l'arrière de l'établissement en songeant que c'était le seul débit de boissons local où il n'avait pas encore contracté de dettes. Par chance, personne ne l'avait encore reconnu.

L'approche du site avait posé problème. La plupart des gens au courant disposaient de leur speeder ou empruntaient un service de navettes clandestin, et très très cher.
Jol'ju avait décidé de prendre le taureau par les cornes. Partant du principe que plus un groupe est connu, plus il a de chances d'arriver en retard et totalement défoncé sur scène, les gars s'étaient dirigés vers la place Mamluk, d'où s'ouvrait la route des montagnes. De là, un dédale de petites ruelles les avait conduits dans les lieux les plus glauques de la ville, où circulait les pires drogues de la Galaxie, rebuts expérimentaux et stocks périmés où venaient s'échouer les junkies en manque de crédits, de sensations fortes ou tout simplement de goût de vivre.

Les Giddy Rock étaient au nombre de trois. Ca n'avait pas été facile de les reconnaître sans leurs masques. Le chanteur, ils l'avaient coincé au coin d'une ruelle, où il se faisait tabasser par un groupe d'Impérialistes pour une chanson satirique qu'il avait écrit quelques années avant. Il ne pourrait plus écrire grand-chose avant un bout de temps.
Le batteur avait été plus difficile à trouver. Ce fut un des techniciens de la tournée qui le vendit. Jol'ju leur paya à tous deux une tournée d'Epice de Rrwyl, assez pour les faire sombrer dans une douce béatitude jusqu'au lendemain matin.
Quant au guitariste, pas moyen de mettre la main dessus. Ils se contentèrent donc de voler son speeder personnel et, de là, se rendre chez le manager du groupe à qui ils extorquèrent le matériel, les tenues de scène et les pass VIP adéquats avant de le neutraliser et le fourguer à l'arrière du véhicule.

S'ensuivit une longue route de nuit dans le désert, à travers une piste glacée et à moitié effacée que seul l'ordinateur de bord parvenait encore à percevoir.

Enfin, ils arrivèrent à destination...